Un 3e choc pétrolier ?

Avec la flambée des cours du pétrole il est légitime de se demander si le monde ne subit pas un 3e choc pétrolier. La situation n’est en fait pas comparable malgré une hausse bien plus élevée qu’en 1973 et 1979 (voir graphique). En effet il n’y a pas ici de crise (guerre du Kippour en 1973 et révolution iranienne en 1979) mais une hausse globale de la demande, notamment de la part des pays émergents, et une spéculation plus intense. De plus, les économies occidentales sont plus solides que dans les années 1970. On retrouve toutefois un problème constant : les pays producteurs hésitent à investir lourdement pour augmenter la production car il ne sont pas assurés que la demande va continuer de croître. Ils veulent aussi utiliser les bénéfices pour diversifier leurs économies, ce qu’ils n’avaient pas fait dans les années 1970.

Que faire alors ? On peut aujourd’hui encore compter sur d’importantes réserves et une meilleure exploitation de celles-ci car les techniques progressent. Mais la forte demande renforce le nationalisme pétrolier : des pays comme la Russie restraignent l’accès aux gisements. Il faut aussi bien sûr réduire la demande, en consommant moins et en développant des énergies alternatives. La France a réduit sa dépendance énergétique (75% de l’énergie consommée est importée en 1973 contre environ 55% aujourd’hui) mais le coût financier reste important et contribue au déficit commercial. [D’après Le Monde, 4 juin 2008]

T ES, 3e – Les BRIC en force

La parution d’une étude du cabinet Ernst & Young, intitulée « Mondialisation 2.0 : pays émergents, entreprises émergées » a fait grand bruit. Le cabinet d’audit montre que les performances financières et boursières des géants parmi les pays émergents sont comparables voire meilleures que celles des grandes puissances occidentales. Ce rapport évoque une « mondialisation 2.0 » pour signifier qu’une époque est révolue, celles des délocalisations des entreprises occidentales à la recherche de main d’oeuvre bon marché ou de marchés de consommation à attaquer. Désormais les entreprises des grands pays émergents partent à l’assaut du monde :  la branche PC d’IBM a été rachetée par le chinois Lenovo, Jaguar et Land Rover par l’indien Tata Motors, le Russe Gazprom est devenu un acteur mondial de l’énergie… Tout ceci est révélateur de la nouvelle place qu’occupent aujourd’hui les les BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine) qui concentrent 53 % des entreprises émergentes en nombre et 68 % en valeur.

La chine s’envole

La Chine n’est plus un simple « pays atelier » se contentant d’assembler les productions que les entreprises étrangères délocalisent. Aujourd’hui elle a acquis des technologies lui permettant de gagner son indépendance et sans doute à terme de rivaliser avec les grandes entreprises occidentales et japonaises d’aujourd’hui. On le savait déjà dans le domaines de l’informatique, avec la marque

informatique Lenovo par exemple, ou encore dans le domaine spatiale avec l’envoi de « taïkonautes » dans l’espace.

Le 11 mai, la China a annoncé la création d’un nouveau constructeur aéronautique destiné à produire des avions régionaux dans un premiers temps et sans doute à terme de plus gros appareils pour réduire la dépendance du pays vis-à-vis de l’américain Boeing et de l’européen Airbus. Il s’agit de la « Commercial Aircraft Corp of China » (CACC) un consortium constitué de la ville de Shanghai où est développé l’avion et des deux constructeurs aéronautique chinois AVIC I et AVIC II. De grandes compagnies seront aussi actionnaires.

Le premier avion sera l’ARJ21-700, avec une capacité de 90 passagers. Les essais en vol sont prévus cette année et les livraisons à partir de la fin 2009. A terme, la Chine souhaite fabriquer des avions de plus de 150 sièges ou des avions cargo capables de transporter plus de 100 tonnes.

Nouveaux gisements de pétrole au Brésil

La découverte de gisements de pétrole au large des côtes du Brésil apporte plusieurs perspectives importantes :

– un atout pour le développement du Brésil qui pourrait devenir exportateur et songe à rejoindre l’OPEP

– une revalorisation du territoire brésilien en Amérique du Sud déjà bien doté ( mais toujours derrière le Venezuela, 4e producteur mondial)

– une possibilité de freiner la flamber des cours en augmentant l’offre sur le marché mondial

Ci dessous l’article du Monde du 12/11/07.

Voir aussi ce lien.

Les Brésiliens bientôt rois du pétrole… et leur pays, prochain membre de l’OPEP ? Le président du Brésil, Luiz Inacio Lula da Silva, après avoir été appelé « magnat du pétrole » par son homologue vénézuélien, Hugo Chavez, dit songer à ce futur pour son pays, en passe de devenir exportateur de pétrole.

L’euphorie est née de l’annonce, tonitruante, de la découverte d’immenses gisements de pétrole et de gaz, à proximité des côtes du Sud-Est. La compagnie Petrobras les évalue entre 5 et 8 milliards de barils, augmentant de moitié les réserves nationales actuelles, ce qui propulserait le Brésil parmi les dix principaux producteurs d’or noir, entre le Venezuela et le Nigeria. Autosuffisant depuis 2006, le Brésil a porté sa production en 2007 à 1,9 million de baril jour.

La Bourse de Sao Paulo a accueilli la nouvelle par une envolée du titre de Petrobras, mais l’entreprise nationale rappelle que des études doivent encore confirmer l’hypothèse de ces « méga-réserves ».

BONNE QUALITÉ DES RESSOURCES

Ce trésor énergétique serait enfoui en plein océan Atlantique, à 250 kilomètres du rivage, sous une épaisse croûte de sel, vraisemblablement entre 5 000 et 7 000 mètres de profondeur. Là où le Brésil compte déjà une quinzaine de puits, mais qui extraient un pétrole à moins de 2 140 mètres. Le champ pétrolifère se situe dans la zone de Tupi, qui s’étire sur 800 kilomètres, au large des Etats d’Espirito Santo, Rio, Sao Paulo et Santa Catarina.

Le président de Petrobras, José Sergio Gabrielli, estime que le prix de plus en plus élevé du baril et la bonne qualité des ressources localisées devraient compenser les coûts d’exploitation. La compagnie, qui puise l’essentiel de la production en haute mer, se dit capable d’explorer dans les grandes profondeurs.

Dans le même temps, Dilma Roussef, la ministre chef de cabinet du président Lula, a annoncé que 41 des 312 blocs de cette zone d’exploration qui devaient être mis en vente fin novembre ont été retirés de l’appel d’offres, officiellement pour « la protection de l’intérêt public et de la souveraineté nationale ».

Cette annonce tombe à pic : le Brésil, en pleine croissance, s’interroge sur l’insuffisance de ses ressources énergétiques. Des inquiétudes émergent notamment à propos des barrages hydroélectriques (71 % de l’énergie), qui ne se remplissent pas assez. Début novembre, les habitants de Rio ont été confrontés à des tensions sur le prix du gaz, qui, ici, est notamment utilisé pour faire rouler une partie du parc automobile. Pour freiner une demande trop forte, Petrobras pourrait augmenter ses prix de 15 % à 25 %. Pour faire face à ce manque de gaz, le Brésil s’apprête à négocier de nouveaux investissements en Bolivie.

Annie Gasnier

Article paru dans l’édition du 13.11.07.