Libérez internet !

compInternet a 40 ans. C’est en effet en 1969 que eux ordinateurs de l’université de la Californie (Ucla) sont mis en lien par un cable pour échanger des informations (voir ICI pour les étapes de la mise en place d’internet).

Mais encore aujourd’hui la bataille fait rage pour dominer cet espace. A tel point que cet outil, souvent présenté comme un espace de liberté et d’interconnexions sans limites, est en fait menacé par ceux qui veulent le contrôler. Ainsi en va-t-il par exemple des formats, souvent protégé par des brevets ; des fournisseurs d’accès qui brident l’accès à certains pans du net ; des terminaux mobiles, comme les smartphones, où les applications et les usages peuvent être restreints. Une pétition a été envoyé au parlement européen pour que la garantie de la liberté du Net soit assurée.

On aura grand intérêt :

à lire l’excellent article de Clochix ;

à prendre conscience que l’internet d’aujourd’hui peut devenir un 2e minitel où l’usager n’est plus libre créateur mais simple consommateur ;

à s’intéresser au projet Drumbeat de Mozilla.

Mises à jour :

  • aux États-Unis l’administration Obama, comme elle s’était engagée à le faire, prépare un ensemble de règle pour garantir la liberté du réseau. Voir les articles du Monde et de Libé. [21 sept]
  • lire avec attention cette interview de Jérémie Zimmermann, parue dans le Monde [22 sept] :

Le régulateur américain des télécommunications a annoncé ce lundi que la « neutralité des réseaux » était élevée au rang de principe fondamental, conformément à une promesse de campagne de Barack Obama. Explications avec Jérémie Zimmermann, porte-parole de la Quadrature du Net, qui milite pour qu’Internet reste « neutre ».

Qu’est-ce que la neutralité du Net ?

Jérémie Zimmermann : C’est un fondement de l’Internet tel qu’on le connaît aujourd’hui : c’est le principe qui veut que tout le monde ait accès au même Internet. Il n’y a pas de discrimination sur le réseau, en fonction de l’émetteur, du récepteur ou de la nature des données transmises. Tim Berners-Lee, le créateur du World Wide Web, la définit comme « la capacité à se connecter, en utilisant n’importe quelle application, à n’importe quelle partie » du réseau. Votre fournisseur d’accès à Internet n’influe pas sur ce que vous pouvez faire, ou sur la vitesse à laquelle sont transmises les données.

En quoi est-il important pour l’internaute que le réseau reste « neutre » ?

Jérémie Zimmermann : Prenons un exemple d’atteinte à cette neutralité : la téléphonie mobile. En France, trois opérateurs vendent de « l’Internet mobile ». Mais ce qu’ils vous proposent, ce n’est pas vraiment Internet : leurs conditions d’utilisation interdisent explicitement l’utilisation des logiciels de téléphonie par IP, comme Skype, le téléchargement par réseau peer-to-peer ou encore les newsgroups. C’est d’autant plus problématique que les trois opérateurs ont la même politique : il n’y a pas de vraie concurrence. En Suède, il y a sept opérateurs ; cinq respectent quasiment totalement la neutralité du Net.

Cela pose également des problèmes concernant l’avenir du réseau : jusqu’à présent, il se développait de façon organique, les opérateurs achetant de la bande passante [le volume de données qui peut circuler dans les « tuyaux »] au fur et à mesure de la croissance du réseau. Aujourd’hui, certains opérateurs souhaiteraient créer une « rareté artificelle » de la bande passante, et investir plutôt dans le contrôle et le filtrage, par exemple en proposant à certains clients de les rendre prioritaires. C’est extrêmement dangereux, notamment parce que c’est un frein à l’innovation. Si, demain, le créateur d’un nouveau service doit faire le tour des fournisseurs d’accès pour leur demander de bien vouloir faire passer son service, combien d’entreprises innovantes se créeront ?

La Quadrature du Net a lancé la semaine dernière une lettre ouverte au Parlement européen, demandant le respect de la neutralité du Net, que vous estimez mise à mal par le « paquet télécom », un ensemble de réglementations encadrant les télécommunications en Europe. En quoi ce texte vous pose-t-il problème ?

Jérémie Zimmermann : La directive sur les services prévoit explicitement que les opérateurs doivent informer leurs clients des restrictions d’accès qu’ils mettent en place, ainsi que de tout changement concernant ces limitations. En clair, la législation européenne autorise ces pratiques, pour peu que les consommateurs soient informés.

Le paquet télécom passera début octobre par la procédure de conciliation au Parlement européen. D’après Catherine Trautmann, le rapporteur, les articles ayant trait à la neutralité du Net ne devraient pas être rediscutés lors de cette procédure. Nous encourageons tous les citoyens à contacter leur député européen pour demander que ces articles fassent l’objet d’un nouveau débat, et que soit garantie la neutralité du réseau.

Plusieurs pays, dont la Grande-Bretagne, envisagent d’imposer un filtrage des réseaux peer-to-peer pour lutter contre le téléchargement illégal. Un tel procédé serait-il compatible avec la neutralité du réseau, s’il était mis en place ?

Il s’agit d’un plan B des industries du divertissement, tant il semble manifeste que la riposte graduée [avertissements puis coupure de l’accès à Internet], et sa sanction disproportionnée de coupure d’accès, est vouée à l’échec. Et c’est bien sûr  une atteinte manifeste à la neutralité du Net. Personne ne peut dire quel usage vous faites d’un site ou d’un service. Un site comme the Pirate bay peut être utilisé pour télécharger légalement ou illégalement, mais ce n’est pas à un opérateur de décider si vous pouvez y accéder ou non.

Il existe des lois qui répriment les usages ; mais si on essaye de contrôler les tuyaux, c’est tout simplement la fin de l’Internet tel que nous le connaissons.

propos recueillis par Damien Leloup

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