Au delà de la vitesse. Quel système de transport pour demain ?
Laurent Chapelon, Université P. Valéry Montpellier 3
La conférence commence avec une précaution : il ne s’agit pas ici de faire de la prospective mais de réfléchir sur ce qui existe et certaines expérimentations.
Il y a deux façons de voir le transport. C’est d’abord une ressource, car on se déplace pour réaliser des activités, et qui rend le monde entier accessible. Mais c’est aussi une contrainte, en temps comme en argent. On dispose d’un capital temps de 1440 mn par jour. En France, le temps est utilisé de cette manière :
- repas, sommeil, toilette : 720 mn
- trajet A-R au travail : 50 mn (mais 1/3 de ces trajet dépasse les 60 mn)
Le transport représente donc une part assez faible. La voiture domine encore largement :
- voiture : 74 %
- TC : 11 %
- marche : 7 %
- moto : 4 %
- Vélo : 3 %
Au delà de la vitesse…la performance territoriale des réseaux de transport.
Même si l’usager est en quête d’instantané, la vitesse reste un critère parmi d’autres. C’est aussi une évolution assez récente : de la préhistoire au XIXe siècle, le rapport temps-espace change peu avec une marche à 1 m/s. Les animaux, eux, entrent dans une fourchette qui va de 3 à 8 km/h. Mais aujourd’hui, le rapport marche/TGV subit un facteur de X100, alors que ce facteur n’était que X2 avec le cheval. La quête de la vitesse est illustrée par la compétition : 574 km/h pour le TGV en 2007, et 603 km/h pour le Maglev en 2015 (ce ne sont pas des vitesses d’exploitation commerciale).
Toutefois, au delà d’une vitesse mesurée, d’autres paramètres entrent en compte dans la gestion des transports :
- l’ubiquité : c’est être présent partout en de nombreux lieux. Cela traduit en fait l’accessibilité des réseaux, la ouverture spatiale, la finesse de la desserte.
- l’immédiateté de l’accès aux services : cela explique le succès de la voiture car l’attente est vécue comme une contrainte dans une société marquée par l’ »immédiatisme ».
- l’amplitude horaire du service : c’est la disponibilité du service et là encore l’auto a l’avantage. Des politiques différentes peuvent être menées : À Londres, un service de nuit est assuré dans le métro depuis juillet 2016 avec une fréquence de 10mn ; en France, 4 lignes intercités circulant de nuit pourraient fermer
- le confort : c’est le plus souvent la possibilité de travailler qui est mise en avant, afin de valoriser le temps. Pour Laurent Chapelon, ce point donne avantage au TGV sur l’avion.
- le coût : le site de l’ademe donne des exemples montrant par exemple que l’usage d’une voiture revient très cher sur l’ensemble d’une vie
Un réseau idéal serait donc un réseau accessible partout avec un déplacement instantané vers tout autre lieu de la planète.
Quel système pour demain ?
La question revient à s’interroger sur les leviers d’action pour une mobilité durable. Comme signalé en introduction, la prospective reste difficile. Mais on peut réfléchir sur le contexte, notamment avec des préoccupations environnementales. C’est important car en France le transport représente :
- 32 % de la consommation d’énergie finale
- 70 % de la consommation des produits pétroliers
- 28 % des gaz à effet de serre (dont 92% pour la route)
À l’échelle mondiale, la route consomme 79% de la consommation d’énergie, qu’elle soit fossile ou électrique. Ces chiffrent montrent qu’il faut s’interroger sur la place de l’automobile.
Renforcer les alternatives
L’offre en transports en commun doit se développer, en passant d’une logique de ligne à une logique de réseau. Ces nouvelles perspectives doivent s’accompagner d’une réflexion sur les nouveaux rythmes de vie. Spatialement, les transports en commun concernent autant l’espace urbain que le péri-urbain ou l’automobile est reine. Mais c’est très difficile, car cet espace a justement été aménagé pour la voiture. On peut envisager de donner de la flexibilité avec le concept de transport occasionnel pour faire face aux coûts, bref développer le Transport à la demande (TàD).
Le développement de l’intermodalité
L’intermodalité intègre tant les différents modes de transport que l’ensemble des échelles, du local à l’international. L’exemple du tramway qui relie la gare TGV de Lyon à l’aéroport de Satolas en est un bon exemple. Mais il se heurte à des problèmes de coût car la fréquentation fait défaut. Il faut donc envisager :
- de systématiser les pôles d’échanges autour des grands équipements de transport : aéroports, gare ferroviaires et routières.
- d’intégrer dans les pôles multimodaux d’autres services comme les commerces.
- de mailler les entrées de ville en parcs-relais pour inciter à laisser sa voiture à la limite du périurbain.
Mais il existe des seuils de basculement qui font que certaines villes ré-ouvrent leur centre à la circulation automobile pour dynamiser les commerces. Cette politique est un recul !
La place du vélo
Ce moyen de transport occupe une place très faible en France avec seulement 3 % du total. Il existe donc une marge de progression très importante, mais on se heurte à une question pourtant simple : comment intégrer le vélo aux transports en commun ? Des tentatives existent, comme à Montreal, mais on semble se heurter à une difficulté technique importante liée au ralentissement induit par la manipulation et à des questions de sécurité.
La billetterie
Enfin, le développement du transport intermodal passe nécessairement par un système de billetterie attractive, proposant un titre de transport pour plusieurs modes de transport, comme la carte Octopus à Hong Kong.