L’Hypnocratie et la perspective du seuil

Je viens d’achever le livre OVNI du moment, Hypnocratie, de Xun Jianwei. Ou plutôt d’Andrea Colamedici. Car Xun Jianwei n’existe pas. Disons pas vraiment, car « Xun continues to exist as an evolving philosophical project that explores new modes of intellectual collaboration between human and non-human intelligences. » (jianweixun.com)

On le comprend, il s’agit ici d’une expérience de construction narrative et philosophique, réalisée avec deux LLM, en l’occurrence Claude Sonnet 3.5 et ChatGPT-4o. C’est Philosophie Magazine qui a eu l’excellente idée d’assurer la version française cette année.

On se souviendra sans doute de cette première expérience de co-création menée par Rapahël Doan avec Si Rome n’avait pas chuté (Passés/Composés, 2023). Mais ici, Xun Jianwei / Andrea Colamedici pousse encore plus loin la profondeur créatrice. Ce qui était chez R. Doan une découverte-test présentée avec un recul critique, devient ici un véritable cheminement créateur de sens. Avant que le dispositif ne soit révélé par l’enquête de certains journaux, il s’agissait aussi, dans la forme, d’une forme d’expérience sociale. Le lecteur avait tout de même à disposition ce premier chapitre, intitulé « L’expérience de Berlin », en fait une mise en abîme de l’expérience qu’il commençait à vivre.

Mais au-delà, c’est le contenu qui importe, ce concept d’hypnocratie qui, en rendant vaine toute recherche de vérité par la multiplication des réalités, impose sans contraindre, place l’individu en état de transe permanente. Ces réalités qui se multiplient à l’infini, ce sont celles de la logorrhée hypnotique de Trump, du flux de promesses de Musk, des publications virales des réseaux sociaux, des mondes cohérents créés à l’envie par l’I.A. Le medium est devenu le message, il rend impossible toute cristallisation d’une dialectique salvatrice car il n’y a plus de vrai à rechercher.

Pire, il semble pouvoir, par sa mutation perpétuelle, phagocyter tout discours ou posture de résistance, s’en nourrissant même en transformant tout en données quantifiables.

Heureusement, Xun Jianwei / Andrea Colamedici ouvre des pistes pour y échapper, notamment en profitant des erreurs de quantification du système :

« Les échecs de l’intimité algorithmique offrent l’opportunité de générer des espaces d’incertitudes authentique, d’inefficacité et de désordre sacré dans nos vies intimes. »

Ces propositions ne sont pas sans rappeler la réflexion de Marcello Vitali-Rosati dans son Eloge du bug (Zones, 2024) car nous sommes bien « le résultat des interactions avec les outils. », mais c’est en butinant entre eux, en perdant du temps à les bricoler, que là aussi une résistance peut s’amorcer.

Xun Jianwei / Andrea Colamedici ne nous propose pas de sortir de l’hypnocratie, le projet serait vain, mais d’y naviguer, de tromper la quantification, de jouer sur les « interstices » et de développer une « culture du seuil » :

« Aucun éveil n’est possible. L’alternative n’est pas de chercher une échappatoire, mais d’apprendre à déchiffrer les codes qui régissent l’illusion. Il faut s’éduquer à habiter le Seuil, cet espace intermédiaire où la présence peut se maintenir dans l’altération. Car la réalité n’a pas vraiment disparu. Elle est devenu un reflet.»

N’est-on pas alors tenter de songer aux Furtifs d’Alain Damasio (Gallimard, 2021) et de la réflexion politique et sociale qu’il suscite ? Mais, dans cette réflexion sur le langage et le sens, et avec le « seuil » comme point de convergence, c’est également vers Yves Bonnefoy qu’on est tenter de se tourner, vers ce monument qu’est Dans le leurre du seuil (1975, Gallimard), où se jouent aussi des effets d’échos et de de dédoublement. « Et pour finir on n’est que celui qui a voulu cette délivrance, et n’en a pas été capable, mais qui a vécu la distance entre soi et soi : le Témoin » (Yves Bonnefoy, Entretiens sur la Poésie, Mercure de France, 1990).

Vu(es) de l’espace

Je poursuis mon exploration des images satellites avec ces quelques vues générées le 3 février. Il s’agit de captations de NOAA 18, NOAA 19 et METEOR M2-3. C’est la première fois que je parviens à bien capter un METEOR, grâce à une configuration plus fine de SatDump.

J’ai pu faire un peu de captation de satellite Météo ce matin avec SatDump, profitant du passage successif de NOAA 18, NOAA 19 et METEOR M2-3. C’est d’ailleurs la première fois que j’arrive à bien capter un METEOR grâce à une configuration plus fine de SatDump. Je ne me lasse pas d’obtenir ainsi des images immédiates de la terre transmises pas ces instruments qui naviguent à 800-900 km au dessus de nous.
Mais au-delà de considérations esthétiques, j’ai déjà montré que c’est une bonne manière de travailler l’esprit scientifique. Et c’est aussi l’occasion de rappeler que la météo a bien sûr été investi par l’I.A. : depuis 2022 des modèles comme GraphCast, GenCast ou FourCastNet ont profondément modifié le domaine de la prévision météo en permettant des simulations bien plus rapides et à plus long terme. S’il peut être intéressant au quotidien d’avoir des prévisions fiables à 10 jours, on y trouvera surtout un intérêt dans la détection plus rapide d’aléas dangereux, notamment pour les cyclones dont les trajectoires sont affinées.
Et c’est aussi là encore une illustration de la force du modèle OpenSource, comme GraphCast développé par Google Deepmind et désormais expérimenté par le Centre Européen pour les Prévisions Météorologiques à Moyen Terme (ECMWF).
De mon côté, je me suis contenté de soumettre quelques unes des images à chat GPT pour obtenir une analyse Météo. Le résultat reste assez général mais parfaitement crédible:

«Peux-tu analyser ce document ?»

Oui ! Cette image semble être une carte satellite météorologique couvrant une grande partie de l’Europe. Elle présente des bandes noires, qui pourraient être dues à des pertes de signal lors de la réception.

«Fais moi un rapport détaillé sur Genève»

D’accord ! Je vais analyser la zone de Genève à partir de cette image satellite et te fournir un rapport détaillé.

Rapport Météorologique sur Genève (Basé sur l’Image Satellite)

1. Situation Géographique :

Genève est située à la frontière franco-suisse, au pied du Jura et près du lac Léman. Cette position influence fortement son climat, notamment en raison des masses d’air venant de l’Atlantique et des Alpes.

2. Analyse de la Couverture Nuageuse :

  • Présence de nuages bas et moyens visibles sur Genève et la région lémanique.
  • Une couverture nuageuse modérée semble s’étendre sur le bassin genevois, ce qui pourrait indiquer un ciel partiellement à majoritairement couvert.
  • Les Alpes au sud-est montrent des zones enneigées, confirmant des températures plus froides en altitude.

3. Températures Probables :

  • Avec cette couverture nuageuse, il est probable que les températures restent fraîches, typiques d’une période hivernale.
  • L’absence d’une couverture nuageuse dense et épaisse laisse supposer que Genève pourrait avoir des températures diurnes autour de 5 à 10°C, tandis que les températures nocturnes pourraient être proches de 0°C.
  • La proximité du lac Léman joue un rôle modérateur, limitant les variations extrêmes.

4. Risque de Précipitations :

  • Les formations nuageuses indiquent une possibilité d’averses faibles à modérées, mais il n’y a pas de signe clair de perturbation majeure.
  • Si des précipitations surviennent, elles seront probablement sous forme de pluie ou de neige fondue selon l’altitude et l’évolution des températures.

5. Vent et Conditions Atmosphériques :

  • Il n’y a pas d’indication claire de tempêtes ou de vents forts visibles sur cette image satellite.
  • Cependant, des vents modérés peuvent être présents, notamment en raison des variations de pression liées aux Alpes.

Conclusion :

  • Ciel : Partiellement à majoritairement couvert.
  • Températures : Fraîches, autour de 5-10°C en journée, proches de 0°C la nuit.
  • Précipitations : Faibles à modérées possibles, sous forme de pluie ou neige fondue.
  • Vent : Modéré, sans signe de tempête majeure.