#FIG2015 L’imaginaire géographique est il soluble dans le numérique ?

Table ronde « L’imaginaire géographique est il soluble dans le numérique ? »

Animée par Françoise de Blomac

Avec Jacques Lévy, Henri Desbois, Thierry Joliveau, Matthieu Noucher, Laurent Jegou

 

 

Avant de commencer, les conférenciers applaudissent pour féliciter le courageux public du dimanche matin.

Françoise de Blomac

Les nouveaux supports numériques peuvent-ils porter de l’imaginaire ou est-ce épuisé ? Ainsi, la carte topographique a longtemps été pensée comme scientifique, sans imaginaire. Mais pourtant on continue à projeter des choses dessus et ce, finalement, quelles que soient les cartes

Jacques Lévy

Il faut intégrer la carte dans le tournant géographique des nouvelles méthodes, des nouvelles problématiques. La géographie est trop importante pour être laissée aux géographes, à cause du risque de corporatisme. Il faut prendre en compte l’importance du numérique qui participe d’une dynamique sociale car la géographie est une science sociale. On assiste à l’émergence d’une société des individus : ceux ci sont de plus en plus puissants. Les données de masse sont un moyen d’inventer une vie singulière et les grosses compagnies construisent leur action en tenant compte de la singularité croissante des acteurs, c’est-à-dire de leurs cibles.

C’est aussi la victoire des techniciens sur les technologues qui discourent : JL rappelle le discours du patron d’IBM qui déclarait après guerre que le marché mondial des ordinateurs se limitaient à 3 machines [Note : cette citation, qui évoque plutôt 5 machines, est en fait sujette à caution].

Les techniciens, eux, utilisent des dispositifs pour poursuivre leurs propres buts, tels des « despotes éclairés » comme disait S. Jobs, ayant réussi à se mettre dans la peau des utilisateurs. Mais à la fin ce sont les utilisateurs qui gagnent.

Et l’espace jour un rôle de plus en plus important : il faut donc prendre en compte l’espace des usagers.

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#FIG2015 Une cartographie sonore de la ville de Casablanca

Mon espace proche : de l’espace imaginé à l’espace vécu, une cartographie sonore de la ville de Casablanca

Cette présentation s’inscrit dans les ateliers TICE des parcours pédagogiques. Vous retrouverez l’ensemble des séquences, de manière détaillée et  accompagnées de leurs documents, dans la brochure éditée par la DNE.

Julien Meynet et Mathieu Merlet, du Lycée français Lyautey de Casablanca, nous proposent ici un beau projet. Il repose tout d’abord sur une démarche transdisciplinaire interdegré qui a mobilisé une vingtaine de classes, de la moyenne section à la terminale.

S’intéresser au son est légitime car c’est un objet d’études en sciences humaines, et Joël Chatelet fait lui même un lien entre territorialité et son. L’objectif est double : capter la signature sonore de la vielle et travailler sur l’imaginaire.

IMG_20151002_194912.resizedLes élèves ont parcouru la ville et collecté 240 sons. Ils avaient un protocole d’enregistrement et ont pu réaliser le travail avec un simple logiciel natif sous Android et un export au format MP3. Ensuite, les élèves étaient amenés à écouter un son qu’ils n’avaient pas eux même enregistré pour dire, décrire,  dessiner ce qu’ils entendaient. Les productions finales ont pu être très variées et incluaient des vidéos et des slams. Ensuite, chaque son a été localisé sur une carte avec une balise cliquable permettant de l’écouter et d’obtenir des informations et parfois la production liée. Tout ceci est visible sur le site tous-cartographes. Les différents sons sont également accessibles par thématique ou on peut se laisser guider dans des ballades sonores. En 2e année du projet, la carte peut être complétée et enrichie ; on peut aussi, par exemple en SES, travailler sur les inégalités que les sons peuvent traduire.

Sélection_074.resizedCe travail requiert une forme de technicité et le projet, réalisé dans le cadre d’une APP, a bénéficié de l’intervention d’un informaticien professionnel. Nos collègues nous proposent toutefois une méthode plus accessible avec Edugeo. En classe de 6e, le professeur peut avoir préparé 6 à 7 sons pour faire travailler l’imaginaire des élèves. On envisage ensuite une sortie sur le terrain après avoir confronté les productions de chacun. Cette sortie se prépare avec Edugeo dans lequel on peut localiser les sons. Il suffit pour cela d’utiliser une balise audio dans les informations liées au point, avec un lien vers des fichiers pouvant par exemple être stockés dans un cloud de type Dropbox ou via un service comme Vocaroo.

Nous avons donc là un exemple particulièrement riche et stimulant. Il ouvre des perspectives intéressantes pour des projets adaptables à différents niveaux.

#FIG2015 La Normandie à l’heure de la réunification

Cette présentation s’inscrit dans les ateliers TICE des parcours pédagogiques. Vous retrouverez l’ensemble des séquences, de manière détaillée et  accompagnées de leurs documents, dans la brochure éditée par la DNE.

Stéphane Monnier et Antoine Vaillant nous proposent une séquence construite pour des Terminales de bac professionnel, dans le cadre du cours sur Acteurs et enjeux de l’aménagement des territoires français. Ils ont utilisé une simple salle informatique disposant d’un accès à Edugeo et d’un traitement de texte. Il faudra toutefois avoir veillé à ce que les élèves aient déjà manipulé l’outil Edugeo depuis la seconde, par exemple en profitant de l’AP. L’objectif est que les élèves contextualisent, relèvent, classent et in fine deviennent des acteurs de l’aménagement. À ce titre, on leur demandera une restitution avec texte et croquis.

Deux séquences d’1h30 sont mobilisées. Lors de la première on posera la question « quelle capitale pour la Normandie ? » Après ce diagnostic, une séance plus prospective vise à proposer une solution à la question « quel pôle métropolitain ?»

On prendra en compte le vécu des élèves puisque l’une des classes est plus urbaine, proche de Rouen, et l’autre plus rurale, à mi-chemin de Caen et Rouen. On scénarise le tout en transformant la salle en « bureau d’étude » dans lequel les élèves sont accueillis. Avec l’outil cartographique d’Edugeo, les élèves sont amenés à travailler sur les distances ou encore le poids démographique, mais en comparant les communes et l’ensemble de l’agglomération. Un croquis s’élabore donc au fur et à mesure, et on aura toujours soin d’accompagner l’ajout de chaque figuré par la construction de la légende. Les enseignants disposent d’un poste profeseeur où est installé le logiciel italc : ils peuvent donc observer le travail de chaque élève et intervenir pour donner des conseils.

Lors de la deuxième séance, des textes d’actualités qui montrent que le choix a été fait en faveur de Rouen permettent d’étudier les critères officiels et de se positionner en tant que citoyen.

Voilà un exemple de séance solide et concrète. On pourrait, pour aller plus loin, imaginer que les élèves travaillent en groupe pour diversifier les critères. Ainsi, la question de la distance pourrait-elle être abordée d’un point de vue temporel et non seulement kilométrique. Pourquoi ne pas non plus imaginer que chaque groupe se voit attribuer un projet et le défende face aux autres ?

#FIG2015 Cyberespace – un territoire imaginaire au cœur des conflits géopolitiques

Alix Desforges (@Cyberspace_geop) commence par rappeler l’explosion récente du nombre d’internautes : de quelques milliers au tout début des années 1990 à plus de 3 milliards aujourd’hui avec l’émergence de l’Asie. Le réseau renforce son omniprésence particulièrement avec l’Internet des objets. Internet a suscité de nombreux espoirs et particulièrement la promesse d’un monde pacifié, d’une société égalitaire soit le village globale de Mac Luhan annoncé en 1964. Certains y ont même vu la fin de la géographie du fait des échanges dématérialisés et immédiats abolissant l’espace. Toutefois on remarquera que le vocabulaire reste pourtant très géographique et notamment maritime : on surfe, on navigue, il y a des passerelles… Mais ce n’est pas un territoire, une étendue aménagée par les sociétés humaines au sens des définitions de Brunet (1987) et Lacoste (2003).

Le cyberespace reste un territoire imaginaire et fait l’objet de conflits pour son contrôle. Le terme trouve son origine en 1982 avec l’œuvre de Gibson qui invente ce mot dans un monde de science-fiction violent, avec un contexte de lutte contre des États et compagnies totalitaires. On retrouve et imaginaire dans des films comme Tron ou Matrix. En fait c’est la cybernétique, créé en 1947 qui a inspiré Gibson. Ce terme est fondé sur « pilote de navire » : kubernêtês.

Toutefois le cyberespace ne fait pas l’objet d’une définition consensuelle : cela dépend de qui l’utilise et à quelles fins. De même, les représentations qu’il suscite sont contradictoires. Ainsi, au début des années 1990 il s’impose en référence à un monde libertaire, pacifié, dans territoire virtuel indépendant, souverain, échappant aux lois des États. En 1996 John Perry Barlow (@JPBarlow), fondateur de l’EFF, propose une Déclaration d’indépendance du cyberespace. On voit dans ce cas précis l’influence de l’histoire américaine avec l’importance de la liberté d’expression comme dans la Constitution des États-Unis, des allusions aux thèses de Locke sur la légitimité du gouvernement, à la tyrannie comme durant la guerre d’indépendance. Les racines profondes remontent aux campus californiens contestataires des années 60/70. Ces influences se retrouvent dans l’architecture du réseau, pensée comme décentralisée et sans processus de contrôle.

Le terme tombe ensuite en désuétude mais est repris au début des années 2000 par les États qui veulent y imposer leurs loi, leur souveraineté. On voit émerger la représentation d’un territoire à contrôler, à conquérir. Les rivalité s’expriment par les attaques informatiques, en incluant celles des Anonymous. Il s’agit donc de conflits géopolitiques aux même titre que sur des territoires classiques. On observe alors la multiplication des conflits dans plusieurs buts : protéger un régime, question de la régulation, conflits économiques et sociétaux. Il est devenu un outil des rivalités de pouvoir. On assiste même à une prolifération des attaques depuis milieu des années 2000 : espionnage économique et politique, déstabilisation. Voir à ce titre les attaques pro djihadistes contre des sites français en janvier 2015 ; contre-attaque notamment par Anonymous ; le ver stuxnet en 2011 ; contre l’Estonie en 2007 (par une attaque de type DoS) car c’est pays très connecté et ce fut une prise de conscience, mais cela faisait suite à des manifestations de la communauté russophone contre le déplacement d’une statue à la mémoire des soldats de l’armée rouge.

Les États cherchent donc à s’approprier le cyberespace au nom de la sécurité nationale. En France, la cybersécurité est placé au même niveau (1er cercle) que la dissuasion nucléaire ; c’est le 5e domaine de l’armée (avec l’air, la terre, la mer et l’espace). Une « Attaque d’ampleur » (mais ce terme reste à définir) pourrait être considéré comme un acte de guerre. Ce sont des stratégies de sanctuarisation avec le concept de « souveraineté numérique » en France (P. Bellander, 2014).

Note personnelle : deux articles sont accessibles en ligne, ici et .

#FIG2015 Geo Croquis Bac

Nathalie Rodallec et Samuel Coulon, de l’Académie de Paris, présentent une application pour les élèves des classes de terminale destinée à préparer l’épreuve du croquis. Leur objectif était d’optimiser l’appareil numérique nomade en pensant un usage connecté comme hors ligne. Les usages sont possibles tant pour l’élève, que ce soit avant, pendant ou après le cours, que pour l’enseignant et les formateurs qui sont souvent des historiens.

Le produit est centré sur la réflexion géographique et vise à apporter des réponses à l’élève, notamment lorsqu’il se trompe car l’erreur fait bel et bien partie de la démarche de réflexion. L’application couvre l’ensemble des 7 croquis définis en séries l et ES et donc aussi les 5 de la série S. Attention toutefois, le croquis ne se découvre pas en classe de Terminale et certaines notions doivent déjà être acquises. Toutefois, on peut aussi utiliser l’application en seconde, notamment avec le croquis sur l’inégale intégration des territoires à la mondialisation pour poser un certain nombre de règles.

Chacun des croquis proposés dispose d’une double entrée : l’une pour les L/ES, l’autre pour les S. De plus on rappelle toujours dans quel thème le croquis s’inscrit afin qu’il reste contextualisé. Le menu « Élaborer » propose une démarche en trois temps : comprendre, construire, choisir. On commence par une analyse du sujet, avec des textes qui s’affichent lorsqu’on clique sur les différents termes. À tout moment, des « point info » permettent d’obtenir des informations supplémentaires. On aboutit ensuite à la problématique après un exercice réflectif, important pour la compréhension et donc pour la mémorisation. L’intérêt du numérique est de permettre l’erreur (les mauvais réponses sont signalés par le code couleur rouge).

L’étape suivant consiste à penser les grandes parties de la légende à partir de deux propositions, ce qui, au passage, permet de mobiliser les capacités (mettre en relation, ordonner, etc). La construction de la légende se poursuit avec le choix des items : une liste est proposée mais il se cache toujours un élément à éliminer, car redondant, toujours pour susciter la réflexion. Les auteurs précisent que cela peut être fait en classe entière, en groupe ou en individuel. Une fois les items définis, il faut les placer dans les grandes parties par un glisser / déplacer.

On passe alors à un travail sur le langage cartographique avec un exercice spécifique par croquis. On montre et on explique toujours ce qu’il faut faire mais aussi ce qu’il ne faut pas faire lors de la réalisation graphique.

Notre avis est que nous sommes là en présence d’un outil intéressant qui vise à faire réfléchir sur les croquis. Un usage en cours, où les élèves réalisent vraiment le croquis sera sans doute plus profitable. Attention également à rappeler aux élèves qu’il faut aussi répondre au sujet proposé, en problématisant la légende, et non « réciter » le croquis.

L’application est disponible pour Android et ipad au prix de 2,99 €.