C’est [2]

C’est une petite merveille, réalisée par Charles Joseph Minard, inspecteur général des Ponts et Chaussées, en 1869. Ce document, connu sous le nom de ‘graphique de Minard’ compile pas moins de 6 informations sur un sujet défini.

Le sujet, c’est la campagne de Russie, menée par Napoléon en 1812. Après avoir conquis ou soumis une partie de l’Europe, l’Empereur se lance à la conquête de la Russie et rêve d’une Europe napléonienne de Brest à Moscou. Mais c’est un échec terrible et la Grande Armée est décimée.

Sur ce graphique, Minard nous donne à voir:

– des repères géographiques : les cours d’eau, les villes et les batailles ;

– le trajet : partie de la frontière russo-polonaise, l’armée impériale parvient à prendre Moscou mais doit repartir très vite ;

– la direction : le trajet est doré pour l’aller, en noir pour le retour. La lisibilité est parfaite ;

– la température sur le chemin du retour : exprimée en degrés Réaumur, elle montre bien le froid qui s’intensifie à mesure que l’armée tente de rentrer ;

– le temps : l’indication est combinée avec la température (se lit donc de droite à gauche) ;

– le nombre de soldats : l’épaisseur du trait est proportionnel à la taille de l’armée. On peut lire que, parti avec 442 000 hommes, Napoléon prend Moscou avec 100 000 … mais il n’en reste plus que 10 000 au retour [la Grande Armée comptait en fait entre 600 000 et 700 000 hommes – dont 300 000 Français – en entrant sur le territoire russe, et 30 0000 à 50 000 au retour].

Il s’agit ici d’un graphique exceptionnel, réunissant un  nombre important d’informations en restant d’une clarté remarquable.

Un 3e choc pétrolier ?

Avec la flambée des cours du pétrole il est légitime de se demander si le monde ne subit pas un 3e choc pétrolier. La situation n’est en fait pas comparable malgré une hausse bien plus élevée qu’en 1973 et 1979 (voir graphique). En effet il n’y a pas ici de crise (guerre du Kippour en 1973 et révolution iranienne en 1979) mais une hausse globale de la demande, notamment de la part des pays émergents, et une spéculation plus intense. De plus, les économies occidentales sont plus solides que dans les années 1970. On retrouve toutefois un problème constant : les pays producteurs hésitent à investir lourdement pour augmenter la production car il ne sont pas assurés que la demande va continuer de croître. Ils veulent aussi utiliser les bénéfices pour diversifier leurs économies, ce qu’ils n’avaient pas fait dans les années 1970.

Que faire alors ? On peut aujourd’hui encore compter sur d’importantes réserves et une meilleure exploitation de celles-ci car les techniques progressent. Mais la forte demande renforce le nationalisme pétrolier : des pays comme la Russie restraignent l’accès aux gisements. Il faut aussi bien sûr réduire la demande, en consommant moins et en développant des énergies alternatives. La France a réduit sa dépendance énergétique (75% de l’énergie consommée est importée en 1973 contre environ 55% aujourd’hui) mais le coût financier reste important et contribue au déficit commercial. [D’après Le Monde, 4 juin 2008]